L'art de vivre à la Française

" Pourquoi m'a-t-on emmené 7 fois à Versailles et jamais encore ici ? "

Richard Nixon (1913-1994)

" De tous les lieux que le soleil éclaire, il n'y en a point de pareil à celui-là "

Madame de La Fayette (1633-1693)

     Chantilly est resté aujourd'hui un havre de magnificence tout en conservant pieusement le souvenir du duc d'Enghien, dernier Condé, assassiné le 20 mars 1804 dans les fossés du château de Vincennes sur ordre de Bonaparte : « Il (Napoléon) avait donné le dôme des Invalides pour sépulture au grand Turenne ; mais il avait donné le fossé de Vincennes pour tombe au petit-fils du Grand Condé » (Victor Hugo, discours de réception à l’Académie française, le 3 juin 1841). Ce n’est pas seulement une Maison qui s’éteignait, c’était aussi l'Ancienne France qu'on assassinait avec ses principes, ses valeurs, ses codes, sa noblesse de coeur et son esprit chevaleresque.

« Nous apprîmes le mardi 14 juillet au soir à Chantilly que les révoltés s’étaient emparés de la Bastille ; nous eûmes de la peine à le comprendre, mais enfin cela était ; je crus alors ne pouvoir me dispenser de me rendre le lendemain avec mes enfants auprès du roi, dont au moins la couronne était en danger. » Les princes de Condé et le comte d’Artois partent alors en émigration, d’abord en Belgique, puis à Turin chez le roi de Sardaigne, ses 3 enfants étant mariés aux frères et à une soeur de Louis XVI, avant de rejoindre le Saint-Empire romain germanique. Le duc d'Enghien se doit de « chercher des remèdes aux maux de la France », lui « un Français fidèle à son Dieu, à son Roi, à ses serments d'honneur » est bien décidé à faire la guerre pour remettre sa famille sur le Trône de France : « Tout étant dans la force, il fallait la constituer. En conséquence, M. le comte d'Artois obtint (de l'empereur Léopold II, frère de Marie-Antoinette) la permission d'armer et de former des compagnies. Les villages devinrent des cantonnements et les gentilshommes des soldats. » Mais une armée coûte chère à entretenir,  l’Autriche, la Prusse et l’Angleterre refusant de prendre en charge financièrement les 20 000 combattants, on se tourne alors vers le tsar Paul Ie qui accepte aussi de leurs offrir l'hospitalité en Russie. Après 10 ans de combats, la paix revient, le duc d’Enghien se rapproche de la France et s’installe de l’autre côté du Rhin à Ettenheim en pays de Bade.

  Bonaparte écrit à son frère Joseph : « Je vis dans une défiance continuelle. Chaque jour on voit éclore de nouveaux complots contre ma vie… Les Bourbons me prennent pour leur unique point de mire. » Début 1804 les complots se multiplient, le 9 mars, Georges Cadoudal est arrêté, Bonaparte assume sa décision au nom "de la raison d'Etat" : « Depuis trois ans que je suis au pouvoir, c'est la septième conspiration contre ma personne, c'est le septième assassinat auquel j'échappe. Et maintenant ce n'est plus seulement ma vie qui est en jeu mais celle de la France même. Elle est menacée de l'invasion étrangère et de la guerre civile, il faut que cela cesse, et cela ne cessera que si je frappe à la tête dans la Maison de Bourbon. Justice sera faite. »

Ainsi, suivant les conseils le Talleyrand, "le Diable boiteux", Bonaparte dépêche une escouade de gendarmes pour aller en territoire étranger arrêter le duc d'Enghien, innocent mais ayant le malheur d'être le seul Bourbon à vivre près de la frontière. Ramené à Vincennes il est traduit nuitamment devant une commission militaire. Au terme de l'interrogatoire, le prince consigne sa demande particulière : « Avant de signer le présent procès-verbal, je fais, avec instance, la demande d’avoir une audience du Premier consul. Mon nom, mon rang, ma façon de penser et l’horreur de ma situation me font penser qu’il ne se refusera pas à ma demande. » Dans sa chambre du Pavillon du Roi, le duc bavarde avec le lieutenant Noirot, une vieille connaissance, la conversation est interrompue par l'arrivée du général Harel. Le gouverneur lui demande de le suivre. Le cortège arrive dans les fossés du château, le peloton d'exécution est déjà formé, le duc a compris. « N'y a-t-il pas quelqu'un qui veuille me rendre un dernier service ?», Noirot s'avance, le duc réclame une paire de ciseaux, sort de sa poche une lettre y glisse une mèche de cheveux et son anneau d'or et lui demande de remettre ce colis à sa bien aimée, la princesse Charlotte de Rohan-Rochefort. Sa demande de confession auprès d'un prêtre est refusé. Il murmure une dernière phrase « Il faut donc mourir de la main des Français ! » avant que le crépitement de la mitraille ne fasse couler le sang royal du prince. Son brave et fidèle chien hurle à la mort près de lui, il s’appelle Mohiloff du nom de la ville russe où son maître avait séjourné, signe du destin Mohila signifie tombe, mourir. Le gouverneur fait son rapport : « l'individu arrivé le 29 du présent au château de Vincennes à 5 h 30 du soir a été dans le courant de la même nuit jugé et fusillé à 3 heures du matin. Signé Harel, chef de bataillon, le 30 ventôse de l'an XII de la République française. »

Le lendemain, Chateaubriand apprenant l’exécution sommaire du duc d'Enghien donne sa démission de chargé d’affaires dans la République du Valais et considérera à jamais Napoléon en tyran le dépeignant dans De Buonaparte et des Bourbons comme « un faux grand homme » coupable de mille crimes, sur le Diable Boiteux, il écrira : « Quand M. de Talleyrand, prêtre et gentilhomme, inspire et prépare le crime en inquiétant Bonaparte avec insistance, il craignait le retour de la Légitimité. »

Nicolas Chotard,

Président des Lys de France.

Trésorier de la Chouannerie du Maine.

Il y a tout juste deux siècles, le 31 août 1823, le duc d’Angoulême prenait le Trocadéro à Cadix en Espagne, une expédition militaire de la France afin de rétablir Ferdinand VII, roi d’Espagne dans ses prérogatives traditionnelles. En souvenir de ce fait d’armes on donna le nom de la bataille à une place parisienne d’où nous partirons en autocar samedi 9 septembre 2023 pour aller à Chantilly, "berceau" du duc d’Enghien. Son épouse, Marie-Thérèse de France « Madame Royale », fille de Louis XVI et de Marie-Antoinette ira à la rencontre des Vendéens en septembre 1823 au Mont des Alouettes, pour Napoléon Bonaparte elle était « le seul homme de la famille »…      

https://www.chapelle-expiatoire-paris.fr/agenda/le-seul-homme-de-la-famille.-la-duchesse-et-le-duc-d-angouleme

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